J'ai 22 ans, et ma vie est un véritable bordel. Et pourtant, elle avait plutôt bien commencé.
Quand j'étais petite, je passais mes journées à jouer à la princesse avec ma sœur, qui malgré ses deux ans de plus, adorait s'amuser avec moi. J'étais Cendrillon, elle était la Belle au Bois Dormant.
On a toujours vécut dans ce même appartement à Paris dans le 18ème. Nos parents l'avaient acquis deux ans avant la naissance d'Aurore, un an après qu'ils se soient mariés. Ils n'avaient pourtant pas beaucoup d'argent, mais ce n'était pas le cas de mon grand-père paternel, qui avait décidé de leur offrir cet appartement en guise de cadeau de mariage. Il dirigeait une grande chaine de télévision à l'époque, pas étonnant qu'il ait les moyens de leur offrir un endroit pareil.
Quant à mes parents, ils travaillaient ensemble. C'était d'ailleurs comme ça qu'ils s'étaient connus. Maman est photographe, et mon père est journaliste. Il écrit, elle photographie. Ils ont même publié un livre-photo après leur voyage en Afrique.
A l'école, je me débrouillais plutôt bien, j'avais une préférence pour tout ce qui était artistique, et ce depuis l'école primaire. Les chiffres m'ennuyaient, mais je pouvais passer des heures à dessiner. Je disais toujours que je voulais devenir dessinatrice pour Disney. Mais avec le temps, mes ambitions ont changé. En revanche Aurore a toujours su ce qu'elle voulait faire, et s'y est tenue.
C'est au collège que j'ai fais la connaissance de Maxence. Nous étions dans la même classe de 3ème. Il était craquant, un peu solitaire, mais comme j'ai toujours été quelqu'un de sociable, on a rapidement fais connaissance. On s'entendait vraiment bien, et pourtant je me sentais toujours un peu idiote lorsque j'étais avec lui. Mais à cet âge là, papa me disait que ça ne pouvait pas être de l'amour. C'était une amourette d'adolescente. Pourtant, deux mois après notre rencontre, lorsque ma soeur nous a dit ' cet après-midi, je vous présente mon nouveau petit-ami', j'ai cru que mon cœur allait exploser lorsque Maxence est arrivé à la maison et a pris Aurore dans ses bras. Lui semblait très heureux de me voir ' c'est pas vrai, mais alors Aurore c'est ta sœur! C'est génial ! ' Non, ça n'était pas génial. Il était bien trop jeune pour elle d'abord. Mais elle ne semblait pas de cet avis. Depuis ce jour j'ai fais comme si de rien n'était, et avec le temps Max et moi sommes devenus meilleurs amis. Aurore a rompu avec lui au bout de six mois, quand elle s'est rendu compte que des garçons de son âge étaient tout aussi attirants.
Notre complicité avec ma sœur est toujours restée la même. Elle était même très heureuse lorsqu'à 18ans, je suis sortie avec Maxence. Cette fois, on pouvait bien parler de 'premier amour'. On passait la plupart du temps à quatre, avec le copain d'Aurore. Même si celui-ci m'agaçait profondément, j'avais l'impression qu'il prenait ma sœur pour une idiote. Mais je ne disais rien parce qu'elle semblait vraiment heureuse. Jusqu'à ce qu'il la quitte, il y a un mois. Deux jours après, Maxence me dit que c'était trop compliqué, qu'il ne voulait pas s'engager, et qu'il préférait qu'on en reste là. Ce jour-là j'ai cru que j'allais l'étrangler. Alors avec Aurore, on se consolait mutuellement. Et puis je ne sais pas pourquoi, il y a deux semaines, elle est partie avec Maxence, comme ça, sans m'en parler. Elle m'a simplement laissé un mot:
Petite sœur, je suis désolée.
J'ai compris qu'il m'avait quitté pour être avec elle, parce qu'elle avait décidé de partir dans un pays étranger, à Quebec plus précisément, alors que moi j'avais un poste de photographe à Paris et que je n'avais pas l'intention de quitter cette ville où j'avais grandis. J'avais eu la chance d'avoir trouvé une partenaire avec qui travailler, on avait fait les même études, et à l'obtention de notre diplôme, on avait décidé d'ouvrir notre atelier de photographie. Et ça marchait plutôt bien. Je faisais de superbes séries sur Paris, certaines de mes photos de Montmartre et Pigalle devaient même apparaître prochainement sur des cartes postales.
Mais il avait fallu qu'ils partent, sans m'en parler. Et je peux vous dire qu'être trahie par sa sœur, c'est douloureux, autant que de l'être par celui qu'on aime. Alors je suis partie, j'ai pris l'avion pour les retrouver, dans cette ville inconnue, et tenter de comprendre pourquoi ils ont fais ça.